Aux origines de l'hermine bretonne

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Si le lien entre l'hermine (l'animal) et la Bretagne n'est pas évident et relève davantage du mythe, il est beaucoup plus clair en matière d'héraldique.
Remontons dans le temps...

Bretagne La notion de nation est un concept assez récent. Toutefois, au temps de la Troisième Croisade (1189-1192), par décision du Pape, chaque peuple se voit attribuer une croix d'une couleur distincte. Pour les Bretons, ce sera la croix noire sur fond blanc, le Kroaz du.

Les sources de cette origine ne sont pas des plus fiables et peuvent relever de la fable. Quelques siècles plus tard, peintures et enluminures attesteront toutefois du lien entre la croix noire et les Bretons.

 

S'il est difficile de remonter aux origines de l'héraldique, l'apparition de l'hermine bretonne est paradoxalement plutôt bien documentée.

 

moucheture d'hermine

 

Pierre (1187-1250) est le second fils de Robert II de Dreux et arrière petit-fils du Roi de France Louis VI le Gros.
DreuxBretagneEn héraldique, il est d'usage que les fils cadets brisent le blason de leur père, c'est à dire rajoutent une pièce qui le modifie tout en conservant apparente l'ascendance. Pierre étant destiné à entrer dans les ordres (il fut plus tard surnommé « Mauclerc » suite à ses études religieuses intiales ou à ses déboires ensuite avec le clergé breton), il ajoute donc à son blason un franc-quartier d'hermine, symbole de pureté morale.
Pour des raisons politiques, il épouse en 1214 Alix de Thouars, Duchesse héritière de Bretagne, et est ensuite connu sous le nom de Pierre Ier de Bretagne. De ce mariage naît Jean Ier de Bretagne qui conserve les armes de son père, celles de sa mère n'étant pas entrées dans la postérité.

L'hermine a donc été importée en Bretagne.

N.B. : Parler des armoiries de Bretagne, ce n’est pas la même chose que des armoiries de la Bretagne. L’article déterminant implique la notion d’identité territoriale voire de nation, et tel n’était pas encore le cas dans un moyen-âge féodal où la terre était le seigneur et le seigneur la terre.

 

Arthur II de Bretagne, l'un des descendants de Pierre Ier Mauclerc, se marie avec Marie, Vicomtesse de Limoges, et naît en 1286 Jean, puis en secondes noces Yolande de Dreux, une cousine éloignée de la même maison capétienne de Dreux.

 

BretagneÀ la mort d'Arthur II en 1312, Jean hérite du Duché de Bretagne sous le nom de Jean III, surnommé « le Bon ». Ses relations avec sa belle-mère Yolande sont exécrables. En 1316, il décide de faire disparaître de son blason tout lien avec la famille de Dreux et ne conserve que l'hermine plain, que nous connaissons aujourd'hui.

 

La France avait ses lys, la Bretagne a désormais ses hermines.

 

Jean III mort sans descendance, éclate la Guerre de Succession de Bretagne (1341-1364) au terme duquel le Duché passe aux mains des Montfort. Mais le blason ducal reste inchangé.

 

La représentation de la moucheture d’hermine a notablement évolué au fil des siècles, avant de se figer dans la forme qu’on lui connaît aujourd’hui, voire au contraire libérée selon le degré de créativité de l’artiste.

 

moucheture d'hermine (Armorial Le Bouvier) moucheture d'hermine (Armorial de l’Europe et de la Toison d’Or) moucheture d'hermine (Armorial d’Hozier) moucheture d'hermine (moderne, création personnelle)

 

Bretagne (Armorial Le Bouvier) L’Armorial Le Bouvier, établi au XVème siècle, montre nettement les trois points servants à attacher le bout de queue noire au reste de la fourrure.

 

Le Duc de Bretaigne (Armorial de l’Europe et de la Toison d’Or) Dans l’Armorial de l’Europe et de la Toison d’Or daté du milieu du XVIème siècle subsistent la forme des attaches et la présence des poils. Mais la queue n’est déjà qu’à peine reconnaissable.

 

Bretagne (Armorial d’Hozier) Dans l’Armorial d’Hozier constitué au début du XVIIIème siècle, la moucheture a pris sa forme stylisée. Seule l’irrégularité du trait à la main le sépare de la forme plus ou moins conventionnelle connue aujourd’hui.

 

© J-Le, pour La Blanche Hermine

Et aussi...

Héraldique, symboles d’identité régionale

L’héraldique, c’est la science du blason, mais aussi l’art de la représentation des armoiries. Et cette représentation est double : visuelle et textuelle. Il s’agit donc de décrire un blason peint, et réciproquement de pouvoir peindre un blason décrit. Dès lors, l’héraldique est dotée de règles qui permettent la reconnaissance des armoiries, avec des couleurs et des symboles spécifiques.

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